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22 mai, 2021
Pandémie et crise de la biodiversité : même combat ?

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Isabelle Bérubé
Directrice du développement

Amatrice de ski de fond et de cuisine vegan, elle est aussi conseillère municipale à Saint-Bruno-de-Montarville et experte sur les enjeux auxquelles font face les municipalités.
N’hésitez pas à la suivre sur Twitter : @IsaBerube.


Le lien entre l’apparition des pandémies et la crise de la biodiversité est-il réel ?

Doit-on s’attendre à vivre d’autres épisodes pandémiques ou sommes-nous simplement malchanceux? La réponse risque de vous déplaire : partout à travers la planète, des scientifiques, des experts et des leaders prennent la parole pour illustrer les liens entre la pandémie de la COVID-19, notre relation à la nature, et la nécessité de placer la conservation au cœur des plans de relance.

Il est désormais reconnu que :

  1. l’exploitation des animaux sauvages pour leur viande ou pour tout autre usage;
  2. la cohabitation entre des lieux d’élevage intensifs de bétail et des zones encore sauvages;
  3. et la déforestation massive et le développement des villes

ont augmenté et modifié l’interface entre l’homme et la faune. Ces conditions créent une « tempête parfaite »* qui a entrainé un effet de débordement d’agents pathogènes sur les humains. En d’autres termes, notre soif insatiable de nouveaux territoires nous expose à de nouveaux pathogènes.

Le lien entre l’apparition des pandémies et la crise de la biodiversité est-il réel ?

Une forte pression humaine sur la nature

En effet, les besoins toujours plus grands pour nourrir les 8 milliards d’humains – notamment en protéines animales, lesquelles nécessitent de plus grandes superficies de terres pour un même apport nutritif – exercent une pression très forte sur la nature.

C’est assez simple, n’est-ce pas ? Nous empiétons chaque jour davantage sur les derniers espaces sauvages de la planète. Cet empiètement entraîne d’autres impacts que celui du risque d’apparition de nouveaux virus dans la population humaine. En fait, ces mêmes pressions sont les principales causes de la perte de biodiversité à l’échelle mondiale.

C’est essentiellement ce que confirme cet extrait d’une analyse publiée dans le World Political Review : « Les facteurs qui mènent à l’apparition de nouveaux virus au potentiel pandémique sont presque entièrement anthropiques. Qui plus est, ces facteurs sont les mêmes qui mènent au déclin précipité de la biodiversité mondiale ».

Ceci nous permet donc de croire que nous pourrions régler deux grandes crises en mettant en place une seule solution : la protection des espaces sauvages. La protection de la nature permet en effet d’atteindre plusieurs objectifs interreliés incluant la prévention de nouvelles pandémies. Les mesures à prendre sont connues mais leur déploiement doit s’accélérer. La création de refuges pour la faune et la préservation des espaces sauvages sont essentielles et représentent notre plus grande garantie contre l’apparition de nouveaux virus dans la population humaine.

« Les facteurs qui mènent à l’apparition de nouveaux virus au potentiel pandémique sont presque entièrement anthropiques. Qui plus est, ces facteurs sont les mêmes qui mènent au déclin précipité de la biodiversité mondiale ».

Stewart m. patrick, World Politics review

Une dispersion rapide des agents pathogènes

À ce constat, il faut ajouter la facilité déconcertante avec laquelle les humains franchissent en des temps records de grandes distances, traversant les continents et apportant avec eux de nouveaux agents pathogènes qu’ils dispersent facilement en toute méconnaissance. Tout cela créé les conditions parfaites pour assurer la dispersion de ces agents et accélère les risques de pandémies mondiales.

La crise sanitaire provoquée par l’apparition du virus de la COVID-19 nous aura démontré à quel point nos sociétés industrialisées sont indubitablement liées et dépendantes de la nature. Les scientifiques sont unanimes : la fréquence des épidémies ne ralentira pas si nous n’agissons pas en faveur de la biodiversité. Au contraire. Comme l’a dit le secrétaire général des Nations Unies, Antònio Guterres, « Protéger et gérer durablement la biodiversité est nécessaire pour atténuer les perturbations climatiques, garantir la sécurité des approvisionnements en eau et en nourriture et même prévenir de nouvelles pandémies ».  En d’autres termes, le chemin vers la sécurité sanitaire mondiale commence par la protection des espaces sauvages et de la nature qui nous entoure.

Références :

*expression empruntée à l’auteur Philippe Sansonetti, auteur de l’ouvrage : Tempête parfaite. Chronique d’une pandémie annoncée. https://www.seuil.com/ouvrage/tempete-parfaite-philippe-sansonetti/9782021470208
https://news.un.org/fr/story/2021/04/1094852
COVID-19 and protected and conserved areas. Hockings, M.; Dudley, N.; Pasha, Mks.; and Stolton, S., Parks. June 2020
https://www.worldpoliticsreview.com/articles/29637/under-threat-biodiversity-preservation-nature-protection-are-key-to-preventing-pandemics
https://ipbes.net/sites/default/files/2020-12/IPBES%20Workshop%20on%20Biodiversity%20and%20Pandemics%20Report_0.pdf