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Amatrice de ski de fond et de cuisine vegan, elle est aussi conseillère municipale à Saint-Bruno-de-Montarville et experte sur les enjeux auxquelles font face les municipalités.
N’hésitez pas à la suivre sur Twitter : @IsaBerube.
Vous vous sentez plus calme et serein lorsque vous marchez dans le petit boisé près de chez vous ? Ce sentiment n’est pas le fruit de votre imagination. Les espaces nature sont bénéfiques pour votre santé mentale et physique. La science est d’ailleurs de plus en plus formelle à cet égard.
Jouer dehors fait du bien. Jouer dans la nature fait encore plus de bien. Les espaces nature nous invitent à la marche ou à la course. Plus ils sont accessibles, plus grands sont les bénéfices. Une petite forêt clôturée et impénétrable, même si elle se trouve dans votre cours ne vous apportera que le bonheur d’apprécier un paysage bucolique. Et vous respirerez fort probablement un air de meilleur qualité.
Mais un milieu serpenté de sentiers que vous pouvez emprunter en quelques minutes de distance de votre domicile vous procurera de nombreux bénéfices. C’est la conclusion à laquelle des chercheurs, dont ceux de la Norwich Medical School au Royaume-Uni, sont arrivés. Ces derniers ont compilé les résultats de 143 recherches scientifiques portant sur les espaces verts et leurs impacts sur la santé des gens.
Chaque année la SNAP Québec organise l’événement Grâce à la Nature afin de remercier la nature pour tous les services qu’elle nous rend.
Bien que les études différaient dans le type d’espaces verts étudiés – certaines s’intéressaient aux grands territoires naturels non-développés et d’autres aux espaces verts urbains – leurs conclusions démontraient le grand potentiel santé de la nature sur les populations. La réduction du taux de cortisol, de l’hypertension, de la dyslipidémie, des maladies coronariennes, de la mortalité cardiovasculaire, de la mortalité toutes causes confondues, du diabète de type 2, des naissances prématurées, du petits poids à la naissance sont tous des bienfaits qui étaient statistiquement significatifs et qui ressortaient de cette méta-analyse venant confirmé que la nature nous apporte des bienfaits dont nous ne nous doutions pas même.
Et ce n’est pas tout : la nature agit positivement sur notre santé mentale également en réduisant les épisodes d’anxiété, de dépression et d’irritabilité. Nous en avons tous pris conscience pendant le confinement. Au cours de la première vague, les Montréalais ont littéralement pris d’assaut les parcs de la métropole lesquels ont enregistré des taux de fréquentation 40% plus élevés qu’à la normale. « Les espaces verts affecteraient positivement le bien-être mental, le sentiment de rétablissement, la bonne humeur et la vitalité», peut-on lire dans Verdir les villes pour la santé de la population de l’Institut national de santé publique du Québec.
Les Japonais aussi l’ont bien compris et depuis longtemps. Ils sont les premiers à avoir documenté et expérimenté le concept des « bains de forêt» ou « shinrin-yoku». L’État japonais a d’ailleurs inscrit le Shinin-Yoku au programme national de santé publique dans les années ‘50. Pourquoi n’en ferions-nous pas autant ?
Dans un rapport publié pendant la pandémie, à l’été 2020, l’organisation québécoise La Planète s’invite en santé appelle à une multiplication de l’offre en espaces naturels accessibles pour améliorer la santé des Québécois et des Québécoises. Ils y rappellent une triste réalité : 800 000 Québécois seraient atteints de dépression majeure.
Selon une étude du Ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec datant de 2014, « 20,3 % de la population de 12 ans et plus se classait à un niveau élevé sur l’échelle de détresse psychologique ». Avec la hausse croissante du nombre de personnes anxieuses ou stressées depuis le début de la pandémie, nous n’avons aucune raison de croire que ces statistiques sont plus encourageantes aujourd’hui. Au contraire.
Et comment ces bienfaits s’expliquent-ils ? « C’est parce que nous avons des corps adaptés à la nature que vivre dans la société moderne nous met dans une situation de stress » rappelle le chercheur japonais Miyazaki Yoshifumi pour expliquer comment la nature agit sur notre bien-être.
L’avenir dépend de notre capacité à redéfinir
notre rapport à la nature.
Le récent discours du trône a d’ailleurs donné écho à cette préoccupation pour assurer un meilleur accès aux espaces verts. Au Canada, « la pandémie a rappelé aux Canadiens à quel point la nature leur est précieuse. [Le gouvernement travaillera à un] nouvel engagement visant à accroître le nombre de parcs en milieu urbain, pour que tout le monde ait accès à un espace vert. Nous ferons cela tout en protégeant le quart des terres et des océans du pays dans cinq ans » a promis le premier ministre Justin Trudeau à l’occasion de son discours du trône.
Fruit de millions d’années d’évolution en forêt, nos corps ont du mal à s’adapter à la société moderne et ses vertus. Ce constat nous rappelle les liens fondamentaux entre la nature et les humains. Nous sommes interdépendants et intégrés à cet écosystème qu’est la Terre. Nous sommes un tout.
Des chercheurs de disciplines diverses ont tenté de schématiser cette relation qu’entretiennent les humains avec les animaux et les écosystèmes. Le postulat « Une seule santé » en est ressorti. Les partisans de cette approche, qui comprennent maintenant les CDC (Centers for Disease Control and Prevention), l’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), la Banque mondiale, la Wildlife Conservation Society (WCS) et d’autres, soutiennent que notre santé, notre bien-être actuels et futurs sont directement liés à notre capacité à gérer efficacement le monde naturel. C’est aussi ce que nous pensons : l’avenir dépend de notre capacité à redéfinir notre rapport à la nature.
Dans le contexte actuel où la population québécoise a davantage de maladies chroniques, où les problèmes liés à la santé mentale prennent de l’ampleur et où le budget attribué à la santé continue de croître (le budget pour la santé est prévu à 46,6 milliards de dollars pour 2020-2021. Le ministre Lionel Carmant annonçait d’ailleurs le 3 novembre dernier l’ajout de 100 millions supplémentaires pour la santé mentale, il semble prioritaire de nommer les multiples liens unissant aires protégées et santé, ainsi que les impacts économiques subséquents.
Ces constats nous obligent à revoir nos façons de faire. À l’heure actuelle, les considérations relatives à la santé humaine sont largement ignorées dans les décisions d’aménagement du territoire. La science et nos expériences récentes doivent maintenant nous servir pour prendre de meilleures décisions afin de protéger les milieux naturels accessibles qui hébergent notre biodiversité et qui, de surcroît, profitent à la santé des populations.